lundi 5 janvier 2009

conte de Noël

Guilhem (conte de Noël pour les Impromptus)

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Guilhem entra dans la petite église et se dirigea vers le chœur. Il se coucha à plat ventre, sur la dalle froide, les bras en croix. C’était ici, devant l’autel, qu’étaient enterrés ses ancêtres. Il resta là longtemps à sangloter en proie à une douleur incommensurable.

Trois jours auparavant il était parti, à la demande du comte, pour mener une ambassade auprès d’un roitelet maure. Encore une de ces intercessions inutiles… demander une trêve pour la Noël à des non chrétiens était une chose bien difficile, et la demander à un roi maure davantage. Il connaissait trop bien la valeur de la parole qu’il allait recueillir. Il avait quitté sa femme, son château et accompagné d’une petite escorte il avait passé les Pyrénées.

Alors qu’il menait à bien la mission de son suzerain, Seigneur Guilhem songeait à son épouse qui allait, pensait-il, bientôt lui donner un fils. Après avoir obtenu que la contrée ne connût pas de guerre avant le printemps, il prit le chemin du retour. Une colonne de fumée s’élevait des tours de son château. Il piqua des deux sa jument, suivi de la troupe et arriva devant sa demeure dévastée. Un fidèle serviteur, caché sous un tas de branchages, sortit à cet instant pour raconter ce qui s’était passé dans les heures qui avait précédé le retour de son bienheureux seigneur.

Des barbaresques, venus dont ne sait où, débarquèrent une nuit et envahirent la ville puis réussirent par tromperie à ce, qu’au matin, maître Martin, l’orfèvre de la ville, aille au château pour en tenir les portes ouvertes. Ils détenaient sa famille sous la menace de leurs lames recourbées pour assurer la réussite de leur entreprise. Après avoir occis toute la garde qui ne put opposer grande résistance, ils s’introduisirent dans le donjon et emmenèrent la dame du lieu ainsi que ses servantes. Les bateaux repartirent chargés de butin et des prisonnières, mettant voile vers l’Orient.

La nuit venant, les rayons de soleil pénétraient dans l’église par la rosace et Guilhem venait tout juste de prendre sa décision. Puisqu’il avait tout perdu, il prendrait la croix et partirait combattre l’infidèle qu’il soit maure ou barbaresque. Il en taillerait tant et tant de son épée qu’il finirait bien par soigner, par vengeance, la blessure à l’âme qu’on venait de lui faire. Et si cela ne lui rendrait pas sa tendre épouse au moins aurait-il satisfaction d’en faire périr une grande quantité. Il y aurait beaucoup de familles qui n’auraient plus ni pères, ni frères ni fils…

Il avisa le comte de sa décision et partit se joindre à un convoi qui devait prendre la mer en terres occitanes. Il se joignit aux chevaliers du Temple. Pour l’heure, tout en lui n’était que prières jusqu’au jour où la nef qu’il l’emportait vers Saint Jean d’Acre croisa une voile mauresque. Pendant l’assaut, Guilhem combattit vaillamment ; il lui sembla soudain reconnaître une étoffe nouée au front d’un assaillant : une soierie qu’il avait offerte à sa dame l’hiver passé. Le motif en était unique. Aussi avant de l’occire, lui fit-il décrire la personne de qui il détenait cette étoffe. Il apprit en outre qu’elle avait été vendue sur un marché aux esclaves à un seigneur du désert, qui sillonnait la Syrie. Elle était donc en vie et cela lui suffisait. Il partirait combattre dans ces régions afin de les retrouver, de les sauver et de les ramener, elle et l’enfant dans sa Seigneurie.

Qui n’avait pas vu Saint Jean d’Acre à cette époque ne pouvait pas savoir ce que l’Orient avait pu apporter à l’Occident. Son marché, à lui seul vous donnait l’idée d’une société cosmopolite mais aussi d’une société tolérante. Chrétiens, Juifs et Musulmans se côtoyaient sans que l’ombre d’un problème ne fût soulevé. La religion, vu d’ici ne revêtait pas l’importance qu’elle avait au pied du Temple de Jérusalem. D’ici aucun lieu saint n’était à protéger. Les caravanes arrivaient portant les richesses venues de Chine et partaient pour la Sérénissime où elles inonderaient les différents pays d’Europe.

Guilhem trouva asile dans les murs du Temple et partagea pendant quelques jours encore la vie rude des Templiers. Mais déjà, il tirait avantage des liens qu’il tissait avec le Grand Maître afin qu’il pût un jour parcourir les vastes étendues désertiques à la poursuite d’El Mousshein. Malgré une implication émotionnelle évidente, on l’autorisa à rejoindre le Jourdain d’où partiraient de nombreuses patrouilles pour combattre l’Infidèle certes mais aussi ces bandes de pillards qui ruinaient l’économie locale.

Sentir le vent chaud du désert sur son visage le réconfortait. Il retrouva la fougue de sa jeunesse et les nombreux combats auxquels il participait ne faisaient que faire croître sa renommée dans la contrée. Bientôt sous toutes les tentes des nomades l’on vanta la valeur de ce Chrétien et chacun souhaita un jour de pouvoir le rencontrer en duel. Pourtant on parlait aussi de ses valeurs de cœur. N’était-ce pas cet homme qui avait défendu une femme aux portes mêmes d’une mosquée ? N’était-ce pas lui aussi qui avait laissé la vie sauve à un prince musulman, ayant entendu qu’il était le dernier fils de sa famille ?

Ce matin du cinq novembre 1142, un tout nouveau baron prenait la route la route de Damas.

Les renseignements qu’il avait obtenu s ne pouvait être que véridiques. Un matin, alors qu’il sillonnait les rues de Jérusalem, il fut bousculé par un homme. Leurs regards se croisèrent un instant et il sembla à Guilhem que la provocation était trop grosse. Cela ressemblait trop à une invite. D’ailleurs l’homme au turban ne lui faisait-il pas signe de le suivre ? Il l’amena au cœur même du marché et sans presser plus le pas, il se retournait fréquemment pour s’assurer que le Chrétien le suivait bien. Il franchit un porche et pénétra dans une de ces cours intérieures avec sur ses talons le Croisé.

Au fond de cette cour, derrière une fontaine qui rajoutait de la fraîcheur, il aperçut son homme qui venait de se mettre à genoux devant un personnage richement vêtu. A cet instant les lourdes portes se refermèrent derrière lui. Il mit la main sur la garde de son épée. Pourtant d’un geste, son hôte l’invita à s’assoir sur des coussins et à partager la cérémonie du thé avec lui.

- « N’ayez crainte Seigneur Guilhem ! Je voudrais vous remercier d’avoir soutenu ma mère sur l’esplanade des mosquées. Il est plutôt rare de voir un Chrétien prendre position pour un musulman. Et encore plus pour une femme…

- Cela est inscrit dans le code de notre Chevalerie

- Reconnaissez avec moi Messire que ce code n’est pas toujours bien respecté. Les Templiers l’ont souvent bafoué sur Jérusalem. J’ai appris que vous recherchiez des femmes chrétiennes, prisonnières de tribus nomades. Dans le nord d la Galilée, des pillards ont trouvé refuge dans le village de Metullah. Et l’on m’a rapporté que des dizaines de femmes blanches, toutes chrétiennes étaient regroupées, là. Elles sont en attente de leur prochain départ et vont alimenter les harems de Syrie et d’Egypte.

Comme il le faisait ces derniers temps, il partit seul. Le village était à trois journées de cheval. Des bandes de Sarrazins sous les ordres de Nur Al-Din, le fils de Zengi patrouillaient déjà aux frontières de l’Etat de Jérusalem et du comté de Tripoli. Les trêves étaient fréquemment rompues. Il ne voulut, à aucun prix faire courir de risques à d’autres chevaliers. En revanche lui, pour gagner du temps, il s’engagea en terre ennemi et longea le Jourdain qui devait le mener sur les rives du lac de Tibériade.

Alors qu’il longeait le fleuve, il entendit un cri, un appel au secours. Un petit enfant, âgé de quatre à cinq ans venait de tomber à l’eau et se débattait avec les éléments. Guilhem se précipita et sortit l’enfant à temps, alors que deux servantes se lamentaient de ne pouvoir l’aider. Le chevalier le ramena dans son campement. Là, il fut accueilli par Zengi en personne. Tout le monde dans la région connaissait les armes de ce chevalier. Il lui demanda pourquoi, il patrouillait en terres ennemies. Guilhem lui répondit qu’il était parti à la recherche de son épouse. Il lui conta comment elle avait été enlevée, qu’elle avait été la raison de sa quête et sa dernière découverte concernant des pillards du nord.

- « Tu es mon invité ! Reste ici le temps qu’il te plaira. Je vais envoyer des émissaires pour savoir où se trouve ton épouse.

Des caravanes arrivaient et repartaient du campement. Le petit garçon venait souvent par curiosité mais aussi par reconnaissance voir le Croisé qui lui avait sauvé la vie. Sa sagesse lui avait été raconté par des hommes du camp qui chacun rajoutait des histoires tout aussi fabuleuses les unes que les autres. Sa légende commençait à naître.

- « Comment t’appelles-tu petit ?

- Al Malik, Seigneur, mais ici tout le monde me nomme Saladin.

Ainsi, sans le savoir, il venait de sauver la vie au grand Saladin…

Une nouvelle caravane arriva vers le 20 décembre. Mais il n’apprit rien de spécial sur les renseignements qu’il attendait. Des femmes allaient et venaient vers une tente. Et puis, le soir du 24 décembre, le jeune Saladin vint mettre sa main dans celle de Guilhem et l’amena vers cette tente où une femme venait de mettre au monde une jolie petite fille. A la lumière des bougies, il reconnut sa femme. Sa vie allait pouvoir recommencer, car sa décision était prise ; il partirait de ce pays en paix, il rentrerait chez lui.


Un début d'année de folie entre ordinateur à partager avec mon fils, le second, et une jolie gastro qui m'a laissé sur le flanc, je te retrouve ici lecteur

8 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai toujours eu peur des contes de Noël… je ne sais pas pourquoi…
Une gastro ? Moi aussi…
…un autre conte étrange…

tanette a dit…

La gastro a fait beaucoup de "victimes" ces jours-ci...Je te souhaite meilleure santé pour aborder cette nouvelle année.

Camomille a dit…

Bien joli conte Muse... Pas de chance pour toi.... Bon pour l'ordi un peu normal il va falloir songer à en acheter un second;... rires. Soigne toi bien et bises d'amitié!

Anonyme a dit…

Guilhem aurait peut-être apporté la bonne parole de nos jours en Palestine et Israël.

Anonyme a dit…

Un bien beau conte, rha la la !! la gastro fait des ravages... soigne-toi bien.

Anonyme a dit…

Je t'espère en meilleure santé : à croire que les voeux, bien que sincères, n'ont pas suffi à te protéger! Soigne-toi bien! Bisous. Arlette.

vincent a dit…

merci pour ce beau conte de Noël ma Muse.
L'as tu crée toi même ou y a-t-il une part de vérité ?
j'aimerais le savoir.

Muse a dit…

totalement créé Vincent par moi...